Le 6e "Roanne en choeur" avait placé la barre très haut cette année en accueillant Tri Yann lors d'un week-end 100 % celtique, les 14 et 15 février. Du pur bonheur pour les 365 choristes qui ont vécu un échange fort en émotions avec le plus ancien groupe français.
Répertoire :
"Si mort a mors", de Tri Yann, d'après un texte anonyme et une musique traditionnelle, harmonisé par Sylvain Tardy et dirigé par Maud Galichet.
"Pour faire de bonnes crespes", de Tri Yann, harmonisé par Brice Baillon et dirigé par Caroline Magoules.
"La blanche hermine", de Gilles Servat, harmonisé par Christophe Allègre et dirigé par Maud Galichet.
On trouve des bretonnants partout, même à Roanne (Loire). Emporté par la vague celtique, le groupe choral La Source-Rêv'Ado en a fait le thème de son 6e week-end chantant avec des artistes emblématiques : le groupe nantais Tri Yann. Un sacré pari mais, au final, une belle réussite pour Quentin Depalle, vice-président de l'association roannaise, à l'origine de ce projet depuis deux ans. Les compliments des 365 choristes, réunis dans l'amphi du lycée Chervé, sont allés droit au cœur de Jean-Paul Vidal, coordinateur du week-end, qui a réalisé un travail de titan. Les membres de La Source-Rêv'Ado et bénévoles ne sont pas près d'oublier l'ovation de la salle debout pour les remercier. Accueillis par le choeur en répétition dimanche matin, les Tri Yann, ensemble depuis 44 ans (un record pour un groupe français) ont apprécié la valeur de l'échange. "Nous sommes venus à la chanson par le chant choral. C'est important pour nous" a rappelé Jean-Louis Jossic, l'un des "trois Jean".
Pour réussir ce "Roanne en chœur" exceptionnel, pas de potion magique particulière mais une organisation au millimètre et une marmite de bonne humeur. Les personnages d'Astérix veillaient donc au grain, dans ce village peuplé d'irréductibles chanteurs, pour célébrer la Bretagne d'aujourd'hui. Trois titres, dont deux de Tri Yann, étaient proposés, sous la direction de Maud Galichet et Caroline Magoules, accompagnées de Martin Le Ray au piano. Le tout pimenté de quelques refrains des grands tubes du groupe nantais : "Prince qu'en mains tenez", "Le soleil est noir", "La jument de Michao"...
Des émotions uniques
Dirigé par Maud, "Si mort a mors" rend hommage à la duchesse Anne de Bretagne, figure de la culture bretonne. Dès les premières mesures pointent de belles harmonies. Mais il faut penser aux nuances et se lâcher vraiment, « sinon ça fait un peu rock'n'roll du XVIIIe ». Et puis impossible de rester statique. Un grand cercle se forme tout autour de la salle... "Pour faire de bonnes crespes" raconte l'épopée d'une famille du Ve siècle à nos jours, de l'Ecosse à la Bretagne, autour de la spécialité culinaire bretonne. Il s'agit d'être « convaincant pour donner envie de manger la crêpe », selon Caroline, la chef de cuisine, tout en restant concentré sur des paroles piégeuses et coquines. Mais le résultat promet déjà : ça sonne superbement. Enfin, "La blanche hermine", titre de Gilles Servat devenu l'hymne officieux de la Bretagne, donne le frisson dès le premier refrain. Pourtant, "avec sept couplets, on risque de s'ennuyer. Tout est dans l'interprétation" avertit Maud. « Il faut penser la chanson dans sa globalité. » Dans l'amphi, où il a rejoint les choristes en fin d'après-midi, Brice Baillon, directeur artistique et musical de Chanson Contemporaine, n'en perd pas une miette.
Le repas du soir vite avalé, il est temps de se rendre, en bus ou voiture, à la salle du Scarabée, où les choristes de "Roanne en choeur" feront partie des 2 500 spectateurs du concert (produit par La Source-Rêv'Ado) de Tri Yann et de ses huit chanteurs et musiciens. Un spectacle haut en couleurs, mariage réussi des sonorités celtiques et électriques, voyage dans l'histoire et hommage à l'identité bretonne. Après l'entr'acte, le groupe roannais Celkilt prolongera la fête avec son rock celtique plutôt pêchu.
Présents le lendemain à la répétition, les artistes de Tri Yann se prêtent en toute simplicité au contact avec les choristes (photos, dédicaces). La journée s'achève dans un sentiment de partage très fort, une ambiance de feu, avec de belles émotions pour la sérénade finale ouverte au public, mêlant les voix des choristes et des artistes. Dans les gradins de l'amphi, une longue farandole a des airs de fest-noz. « Ce que vous avez réalisé, c'est beaucoup de boulot. Tout est bien pensé. Chapeau pour ce travail. Vous êtes un chœur magnifique » nous ont confié des membres de Tri Yann. Du côté des chefs, on gardera le souvenir d'un "super week-end" grâce à un thème fédérateur, autour d'artistes qui ont su jouer le jeu. Martin s'est souvenu avec émotion de ce jour où, adolescent, il accompagnait sur scène, au clavier, ses illustres compatriotes.
Enchantement, plaisir, c'était aussi le sentiment des choristes, heureux de chanter un type de répertoire inhabituel. Quelques Nantais présents ont apprécié de redécouvrir en polyphonie des chants de leur tradition pourtant si familiers. Pour d'autres, la passion explique tout : « La musique celtique nous plaît. Elle se transporte partout. C'est pour ça que nous sommes venus. Et puis chanter à 360 procure des sensations uniques. Vivement la prochaine édition ! »
Reportage de Jean-François Vaizand
Photos de Stéphane Synodinos
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