Stéphanie Stozicky : Il y a le ciel bleu et le soleil (quand il ne tombe pas une grosse drache... nous étions en plein cœur de la saison des pluies!), l'océan pacifique, mais aussi des gaz d'échappements noirs des pick-up, des bus… des flamboyants, des mangues et des avocats à tire-larigot (pour le coup on est tombé dans la bonne saison!), des gens très sympas mais aussi des maras (que nous n'avons pas croisés fort heureusement! Je parle bien des maras, les gens sympas, on en a rencontré pas mal), un centre-ville historique de San Salvador en travaux mais avec de bâtiments incroyables comme l'église Rosario, des palmiers, des belles villas, des "bidonvilles"... Bref, c'est beau, c'est dépaysant, et bien différent de ce que nous connaissons ici !
Martin Le Ray : Nous avons pu visiter le centre de San Salvador avec une choriste professeure du Lycée Français, Ena, qui est salvadorienne, et qui s'est proposée généreusement de nous accompagner une demi-journée. La cathédrale, marquée par l'histoire de l'évêque Romero, et l'église Rosario, chef-d'œuvre d'architecture moderne, ont été nos principales visites dans un centre-ville complètement bouché par des travaux de rénovation gigantesques.
Avec Max, nous avions profité d'un lundi plus léger pour aller au "port" de la Libertad, une petite ville côtière à 40 minutes (sans embouteillages) de San Salvador. Ce port, c'est simplement une jetée dans l'océan Pacifique, transformée en étal de poissons semi-couvert, et au bout de la jetée, un système de poulies, remonte les bateaux remplis de pêche fraîche ! Nous en avons profité pour aller nous baigner avec précaution dans l'océan Pacifique, qui n'a de pacifique que son nom, vus les courants et les vagues énormes qui s'abattaient sur nous... Nous avons travaillé au sein de l'espace culturel du Lycée Français Antoine et Consuelo de Saint-Exupéry de Santa Tecla. Nous avons aussi profité des locaux de l'Alliance Française, qui se trouve dans le quartier diplomatique de la capitale. Les salles de classe se sont transformées en salle de répétition pour le "Coro Pro", un ensemble de 17 chanteurs issus de deux chœurs aguerris.
A la fin de notre séjour, nous avons répondu à l'invitation d'un choriste mexicain pour passer 24h dans une villa au bord de l'océan. Une fin de séjour que nous nous sommes offerts dans un luxe un peu dément, vu le niveau de vie du pays, mais malgré tout agréable après une semaine très chargée !
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Comment les choristes salvadoriens ont accueilli le répertoire qui avait été défini ?
Martin Le Ray : En fait, chaque groupe (NDLR : le chœur d’enfants et les deux chœurs d’adultes) avait déjà travaillé en amont, donc, nous n’avons pas pu observer pas la première rencontre avec le répertoire. Par contre, en travaillant avec eux, et en approfondissant l'interprétation, et la prononciation, le sens de certaines chansons leur sont apparu plus clairement, et pour certains non francophones (adultes), il y a eu certaines révélations face au sens et à l'histoire des chansons (
Je l'aime à mourir,
Medley Gourmandise,
La bombe humaine ...). La compréhension du propos poétique a été une vraie clé durant les répétitions.
Stéphanie Stozicky : Comme le dit Martin, nous n'avons pas vécu la découverte avec les choristes. Je vais surtout parler des enfants, car c'est avec eux que j'ai travaillé en tant que chef de chœur : Je pense qu'ils n'avaient pas compris tous les sens des textes avant mon arrivée, et pas sûre qu'ils aient tout compris après mon arrivée ! Effectivement, même si ces enfants sont scolarisés au lycée français, vous imaginez bien que certains textes peuvent rester flous pour des élèves de CP pas encore très à l'aise avec le français ! Malgré cela, ils ont su s'approprier les chansons choisies (
Poussière d'étoile,
La bombe humaine,
Gardien de nuit,
Mama Sam et
Les mains d'or), et je vous assure que les frissons étaient garantis sur la Bombe humaine… La musique est un langage universel, et même si ils ne comprenaient pas toujours intégralement ce qu'ils chantaient, la magie de l'interprétation opérait quand même.
Quelle est la particularité pour vous en tant que pianiste ou chef de chœur de diriger un public non francophone ?
Martin Le Ray : Pour moi qui dirigeait les adultes, le plus complexe a été de jongler avec les langues ! Le chœur était composé de plusieurs nationalités, francophones ou non, et au début j'ai voulu tout "faire" en espagnol ! Plus facile à imaginer qu'à réaliser. Mais les choristes eux-mêmes m'ont demandé de parler français, pour améliorer leur compréhension. Ils se sont entraidés pour se traduire les quelques mots qu'ils ne comprenaient pas. Finalement, je n'ai gardé l'espagnol que pour les informations importantes, et les blagues, sur les conseils de Max ! Dans le Coro Pro, seuls deux d'entre eux étaient francophones, donc là j'ai fait toutes les répétitions en espagnol, un petit casse-tête mental pour être réactif, spontané, et précis avec des choristes très musiciens !
Stéphanie Stozicky : En tant que chef de chœur des enfants, j'avais la chance de ne pas avoir à m'exprimer en espagnol. Heureusement pour moi qui ai fait Allemand 1ere langue et anglais 2eme langue dans ma scolarité ! Même si certains n'étaient pas encore très à l'aise avec le français, le langage corporel et universel de la musique était compris sans problème. En tant que pianiste, j'ai admiré Martin qui devait avoir 2 cerveaux lors des répétitions ! Et même si je ne parle pas bien du tout l'espagnol, je n'avais pas de difficultés à comprendre ce qu'il disait, d’autant qu’il entamait certaines phrases en espagnol pour les finir en français. Ce qui nous a permis de vivre quelques moments assez drôles en fait !
Quels ont été les principales difficultés à la réalisation de ce projet ? Culturel ? La langue ? La distance etc...
Martin Le Ray : La première difficulté a été de monter ce projet à distance, à coup de mails, de messages, et de coups de fil en horaires décalés avec Max... Il a beaucoup porté cette aventure, dont nous n’imaginions pas ici toutes les contraintes, ainsi que les tenants et les aboutissants... Une fois sur place, c'est l'adaptation qui a été notre principal défi !